Il y a le Japon côté traditionnel, dont les peintures Nihonga offrent une bonne synthèse, et le Japon version ultra-technologique irriguant également un imaginaire qui a largement dépassé les frontières de l’archipel. C’est de ce côté-ci qu’il faut ranger l’appartement de l’architecte Suguru Fukuda, témoignant à la fois des expérimentations poussées des Japonais en matière d’habitat – on pense aux « Capsule Hotels » – et de sa passion pour le cinéma et ses effets.
En plein Tokyo, à seulement 30 minutes de Shibuya et ses célèbres passages piétons très fréquentés, le quartier de Setagaya est plus tranquille et résidentiel. Sans hautes tours mais avec de nombreuses écoles, l’arrondissement est particulièrement apprécié des familles. C’est dans un bâtiment de quatre niveaux construit au début des années 1980 que l’architecte et sa famille jettent leur dévolu sur un appartement d’angle au dernier étage. Avec trois chambres et de nombreuses cloisons, le plan est alors très fragmenté et loin d’être au goût des nouveaux propriétaires.
« Tous les murs non structurels sont démolis et le plan d’étage entièrement modifié. »
Quelques contraintes s’imposent au concepteur : la position des pièces d’eau ne peut être modifiée en raison de murs porteurs et de canalisations non déplaçables car trop anciennes. La salle de bains devient alors le point de départ d’une large « bande technique » le long de la façade est. Ainsi, avec la chambre, les toilettes et tous les rangements, elle est camouflée derrière une façade intérieure en bois de couleur rose. La place est alors laissée à un espace fluide et continu dans lequel les usages se mêlent et s’entremêlent. Des éléments fixes comme la cuisine et un bureau viennent habiller la façade ouest. Le reste consiste en éléments de mobilier mobiles (table, banquettes, armoires, etc.), comme les décors d’un plateau.
« Le défi était de créer l’expérience spatiale que j’avais imaginée. »
Immense fan de cinéma, Suguru Fukuda voulait créer des effets visuels cinématographiques qui influenceraient la vision de l’espace de son appartement. « J’ai toujours été intéressé par l’expérience spatiale à travers les films. En regardant La Nuit américaine de François Truffaut, j’ai eu l’impression que l’espace du spectateur et celui dans le film s’agrandissaient rapidement. Je voulais recréer cette expansion infinie dans un espace réel. » Il choisit donc d’abaisser visuellement le plafond à 1,85 mètre en le peignant entièrement en gris et d’étirer les zones latérales avec de la couleur comme le rose dans l’unique but de créer un rapport de 16:9. L’espace paraît se dilater et être plus généreux que la réalité. Ce n’est donc pas Bienvenue à Gattaca, mais à Setagaya !
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