Toile blanche dans 85 m² à Oberkampf
Un cocon pour mère et fille par l'architecte Alexandre Deshayes.
Bénédicte, la propriétaire, vit ici avec sa fille adolescente Ysilde. C’est un immeuble de faubourg, situé à Oberkampf, quartier animé du 11e arrondissement de Paris. Pourtant, quand on pénètre dans l’appartement, on oublierait presque instantanément l’ébullition de la ville. Un havre de paix visuel avec pour couleur dominante le blanc, donnant immédiatement une impression de calme et de sérénité. C’est l’œuvre de l’architecte Alexandre Deshayes, habitué des ambiances épurées. Je travaille beaucoup sur la toile de fond. J’aime notamment particulièrement les sols blancs. Cela apporte beaucoup de calme et permet de sublimer des pièces vintage que l’on va installer par la suite par exemple. Les murs blancs quant à eux laissent la possibilité aux clients de s’exprimer avec leurs photos, des tableaux… Il y a un côté muséal je trouve, ajoute l’architecte.
Si Bénédicte et sa fille bénéficient aujourd’hui de 85 m², il n’en était rien avant les travaux. L’appartement existant est le fruit de la réunion de deux anciens appartements et d’un bout de couloir, racheté par Bénédicte. Pour rénover le tout, plus de six mois de travaux ont été nécessaires. Des travaux stoppés net, pour cause de Covid 19. On a été confinés trois jours après la démolition… ! L’entreprise a repris le travail une dizaine de jours après le confinement. Côté aménagement, Alexandre Deshayes a eu carte… blanche ! Les seuls impératifs : créer deux chambres, deux salles de bain, une cuisine ouverte, une cave à vin et mettre du noyer quelque part ! J’ai fait plusieurs propositions, mais celle-là a rapidement été une évidence avec le côté jour/nuit, l’arrière-cuisine…
Quant aux finitions, rien n’a été laissé au hasard… La richesse d’un projet se trouve dans les détails. Les robinets sont importants, les poignées de porte, les radiateurs… Car, si de prime abord, le travail d’Alexandre pourrait paraître minimaliste, il n’en est rien. L’architecte aime porter l’attention sur des détails choisis avec soin, qui viendront immédiatement sublimer le résultat final. Illustration en images.
Nous voici dans l’entrée, avec sa petite niche sur la gauche pour déposer ses clés, son casque… Le plus : elle est équipée de prises pour charger son téléphone. Pratique !
Au loin, on devine déjà la pièce de vie…L’objectif était qu’en rentrant, on soit aspiré par les fenêtres au bout, avec une jolie perspective.
Découverte de la pièce de vie qui accueille un espace salon, salle à manger et la cuisine. On se rend bien compte ici de la fameuse toile de fond blanche et des ajouts de couleurs et matières par petites touches.
On pivote sur la gauche pour observer la bibliothèque sur mesure, pièce signature de l’architecte ! Ici, elle prend quasiment toute la hauteur. On a décidé d’ignorer la poutre et de monter jusqu’en haut ! On y accède par une échelle fabriquée par un ferronnier.
A l’intérieur, l’architecte a joué sur les profondeurs pour cacher des conduits. D’où la forme particulière, pas vraiment régulière.
La bibliothèque est, elle aussi, pensée comme une vraie boîte blanche. Les habitants peuvent ainsi l’habiller comme ils le souhaitent et amener de la couleur avec des objets, des livres, ici ou là. Ca pourrait presque former un tableau au final.
Autre particularité, discrète, les montants horizontaux sont légèrement en retrait pour valoriser les lignes.
Quelques pas nous mènent à la salle à manger. Une table en bois, des chaises chinées et des luminaires en acier de chez Merci suffisent à signifier l’espace.
Sur le côté, on devine une (très haute) porte…
Gagné ! C’est l’accès à l’arrière-cuisine où l’on retrouve notamment la cave à vin qui figurait dans le cahier des charges de Bénédicte.
En face, un plan de travail pour poser l’électroménager du quotidien, afin de ne pas encombrer la cuisine ouverte, et des rangements accueillant le lave-linge, le four, le micro-ondes etc.
On repasse par la salle à manger pour poursuivre la visite. L’occasion de s’arrêter un instant sur le parquet en chêne neuf, qui a été repeint en blanc. Il a été posé à « l’allumette », en recréant l’espace entre les lames, pour imiter le parquet ancien.
Nous voici dans le salon, blanc immaculé, avec son canapé et ses rideaux en lin Caravane. La cheminée a été complètement reconstruite et promet des soirées conviviales et chaleureuses les mois d’hiver.
Seuls points de contraste, la table basse et le fauteuil ainsi que la bibliothèque en acier plié que la propriétaire avait trouvé auparavant au Conran Shop.
On passe aux chambres avec, tout d’abord, la chambre parentale et son lit Sofitel pour des nuits dignes d’un hôtel 5 étoiles ! La table de nuit trouvée chez un antiquaire à deux pas de l’appartement vient, là encore, jouer les contrastes.
Derrière le lit, un shoes closet accueille les souliers de Bénédicte qui voulait pouvoir voir ses chaussures !
De l’autre côté de la chambre, un grand dressing sur mesure. L’idée était qu’il soit sol/plafond et qu’il disparaisse presque. Finalement, on ne voit que la trame des portes.
Sous la fenêtre, un radiateur en fonte ancien restauré par Frédéric Matt et peint en noir, comme tous les radiateurs de l’appartement.
Vous l’aurez sûrement deviné, derrière la paroi vitrée se cache… une salle de bain. Je voulais initialement mettre un verre flute entre la chambre et la salle de bain mais, pour des raisons d’intimité, notre choix s’est porté sur du verre blanc.
Face à nous, le lavabo sur mesure en acier, très étroit et volontairement allongé pour étirer les perspectives. On peut s’en servir à deux, sans avoir l’éternelle double vasque. La salle de bain était assez longue mais elle mesure 1 m 10 de large, c’est une performance !
Focus sur les appliques du studio Michael Anastassiades et la mosaïque de marbre de carrare qui a la particularité de n’avoir quasiment pas de joints.
Derrière le lavabo, une grande douche, toujours en mosaïque de marbre, avec une petite marche pour y déposer les savons, etc.
On termine avec la chambre d’Ysilde. Il n’est pas rare à Paris que les gens tablent sur le fait que les enfants fassent leurs études en restant à la maison. C’est important de pouvoir imaginer la chambre dans le temps, avec un lit plus grand, etc.
C’est donc ce qu’a fait Alexandre Deshayes en intégrant un grand lit mais aussi un large dressing et un coin bureau afin d’accompagner l’adolescente dans son évolution.
En guise de tables de chevet, des boîtes empilées sur lesquelles repose une lampe noire, se démarquent.
Ysilde possède elle aussi sa propre salle de bain. L’architecte a ici volontairement utilisé un faux béton ciré, car il est plus difficile de donner des consignes d’entretien à un enfant.
Zoom sur le coin bureau, au bord de la fenêtre. Il est éclairé par un cône venant de chez Merci, comme ceux de la salle à manger. Le sens des détails toujours !
Photographies : Agathe Tissier
Texte : Julie Giuliano
Réalisation : Alexandre Deshayes