Dès le passage sous le porche de l’immeuble, on devine la quiétude d’une cour intérieure végétalisée, un vrai privilège en plein cœur de Paris.
Les rêves de Sabine prennent de la hauteur
Lorsque Sabine découvre ce petit 2 pièces, pile dans son quartier de prédilection, près de la gare Montparnasse, il ne paye pas de mine : fruit de la réunion de deux chambres de bonne et de l'ancien couloir de la copropriété, il est bas de plafond, sombre avec ses deux mini Velux et ses pièces étriquées, en mauvais état…
«Pourtant, j’ai tout de suite su que j’allais réussir à en faire un lieu de vie adapté pour moi : la vue sur les toits, le plein ciel, le calme (le seul bruit : les goélands qui nichent sur le toit d’en face !), les tomettes, tout y était. Avec en bonus le jardin partagé dans la cour, de quoi garer mon vélo à l’abri des regards, et des voisins charmants.»
Soucieuse d'être bien accompagnée dans cette rénovation qui s'annonce délicate, avec une restructuration totale, des contraintes techniques pour ouvrir au maximum sans fragiliser la structure, Sabine contacte Sloft Projets afin qu'ils lui conseillent un architecte spécialisé dans la restructuration et la maximisation des surfaces parisiennes.
«Ils m'ont envoyé plusieurs noms de leur réseau et le courant est immédiatement passé avec Jean-Malo Le Clerc. Il a été très patient car j’avais en tête un premier plan dont j’avais du mal à me départir, mais il a su être convaincant et créatif !»
Les deux grands sujets de cette rénovation étaient la lumière et la matière.
«Nous avons passé des heures sur la couleur du béton ciré, sur le choix des tomettes (je crois que Jean-Malo m'a présenté plus de 10 références avant que j'arrive à me décider !), de la faïence et du bois. Je suis hyper heureuse du résultat. En plus du charme de cet appartement, les matières sont chaleureuses, agréables au toucher. Pour accentuer cette sensation de douceur, les angles sont arrondis partout où cela est possible. C'est tellement agréable : je ne me cogne nulle part !»
Afin d'apporter du volume et de la lumière, Sabine obtient l'accord de la copropriété pour récupérer les combles perdus (1,20 m de hauteur supplémentaire !) et Jean-Malo l'accord des services d'urbanisme pour installer une grande verrière sur le toit, côté cour.
«Afin de repartir sur une page blanche, explique l'architecte, j’ai décidé de retirer le maximum d’éléments non porteurs et de réaliser un curage complet de l’appartement. La salle d'eau a déménagé dans l’ancienne cuisine, à l’entrée, entre deux murs porteurs, et la cuisine fait désormais partie intégrante du mobilier sur mesure que j’ai dessiné, poignées comprises. Concernant le couchage, Sabine envisageait une mezzanine, mais la hauteur gagnée en récupérant les combles ne permettait pas de créer une pièce confortable, tant en bas qu’à l'étage. J’ai alors suggéré un meuble estrade, qui se prolonge en banquette-escalier pour accueillir l’espace dînatoire et du rangement et, sous le lit, le prolongement de la cuisine avec les fonctions techniques dissimulées : machine à laver, frigo et vaste espace de stockage.»
Pour habiller le mur courant du salon à la chambre, Sabine craque pour un magnifique papier peint panoramique, reproduction d'une œuvre de Thomas Ender (1793-1875), représentant une vue de la baie de Rio de Janeiro et l'église de Nossa Senhora da Gloria do Outeiro.
«La nature luxuriante et très verte, les couleurs douces de l’arrière-plan transforment ce panneau en un paysage onirique dont je me réjouis tous les jours.»
Finalement, alors qu'elle pensait avoir acheté un tout petit espace, l’architecte a réussi la prouesse de lui donner tout d’un grand.
«Je ne m’y sens pas du tout à l’étroit, il est hyper facile d’usage, plein de rangements, et même Saxo, ma chienne, y a sa place attitrée ! Compact et élégant, il est tout à fait adapté à ma vie.»
Mais ce n’est qu’arrivé en son sein que l’on découvre vraiment tous ses charmes : en effet, un véritable îlot de verdure a pris place ici. «Ce jardin est en responsabilité partagée des copropriétaires, nous y plantons des fleurs, le nettoyons et l’entretenons à tour de rôle. Il est à l’image de la diversité des voisins : des fleurs délicates y côtoient quelques roses épineuses…» taquine gentiment Sabine.
Depuis l’entrée, on découvre la perspective et la sensation de volume apportées par le travail de l’architecte. L’agencement a été minutieusement pensé, sans oublier ces « détails » qui font l’âme d’un lieu, comme ici l’applique en marbre et acier à gauche, et celle en terre cuite (Hans, Tosco Studio), à droite, au-dessus du plan de travail de la cuisine.
L’œil est irrésistiblement attiré par le paysage luxuriant qui occupe le mur du fond, sur lequel vient s’appuyer l’escalier / banquette / rangement menant à la chambre. La verrière qui isole cette dernière crée une strate supplémentaire et agrandit l’espace plutôt que de le réduire. Dessous, dans le prolongement de la cuisine, se cachent le réfrigérateur, la machine à laver, la cave à vin…
Douceur des teintes, richesse des matières… Le mur cache en toute élégance des éléments porteurs. Derrière sa porte en bois prend place la vaisselle, et au pied de la bibliothèque, une cheminée au bioéthanol a été intégrée. Il ne reste plus qu’à prendre un livre et se pelotonner sur le canapé au coin du feu…
Sous la verrière sur brisis créée lors de la rénovation, le canapé multicouche, «génial. Il vient de la très jolie boutique Le Monde Sauvage, boulevard Raspail. Vous pouvez choisir chaque matière, chaque couleur. C’est de l’ultra sur-mesure ! Les coussins, issus de la collection de Caroline de Benoist, me rappellent quelques-uns de mes voyages, notamment l’Inde et ses joyeuses couleurs.» À l’arrière, le meuble sous rampant dessiné par l’architecte renferme le ballon d’eau chaude…
«Cette affiche de La Délirante est un vrai coup de cœur ! C’est une reproduction d’un dessin de Sam Szafran, qui a été très actif dans le Montparnasse des artistes des années 1970. Une façon de faire entrer chez moi un peu de l’ambiance du quartier, quand Zadkine ou Foujita payaient leur soupe à la Coupole ou à la Closerie des Lilas en croquis ou en œuvres d’art…»
Pour redécouvrir son œuvre si fine : l’institut Giacometti, à 5 minutes de l’appartement. Une reconstitution de l’atelier de l’artiste, magnifique. 5 Rue Victor Schœlcher, Paris 14e
Pour son choix de dingue : le caviste Mi-Fugue Mi-Raisin. Des vins à température, des vins nature, des sourires et des conseils de qualité, une vraie valeur dans le quartier. 36 rue Delambre, Paris 14e
Pour prendre l’air : le cimetière du Montparnasse. Ma balade préférée : entre les tombes de Mireille Darc et de Gainsbourg, cherchez celle de Joseph Kessel (et relisez toute son œuvre !), celle de Wolinski ou encore celle de Jacques Chirac : chaque année, des musulmans viennent y chanter des sourates en son honneur (d’autres déposent des pommes!), je trouve ça très émouvant.
Béton ciré Bibliothèque Bois Carrelage Cuisine ouverte Marbre Mezzanine Miroir Papier peint Tomette Verrière
Photographies : Juan Jerez
Texte : Edwige Nicot
Réalisation : JMLC Studio