Revoir ses critères supposément à la baisse et gagner encore en confort de vie : un paradoxe vécu comme une révélation par l’architecte Lisa Castagnino et son époux Jonathan lors de leur premier achat immobilier. « Quand nous nous sommes lancés dans ce projet, nous n’envisagions pas d’investir dans un rez-de-chaussée, encore moins sur rue – d’abord pour des questions de bruit, mais aussi de promiscuité avec l’extérieur et de sécurité. À la visite de ce bien, nous avons pourtant presque immédiatement reconsidéré notre point de vue. »
Haut de plafond, l’ancien atelier-boutique, situé dans une impasse du 20e arrondissement et déjà transformé en logement privatif, bénéficie d’une triple exposition ainsi que d’une surface idéale – 78 mètres carrés – pour le couple et sa fille. « Nous nous sommes rapidement rendu compte que cette situation avait des avantages – et non des moindres : porter un enfant en bas âge dans des escaliers peut, par exemple, s’avérer ardu… » L’appartement bénéficie aussi d’une luminosité supérieure à celle de certains premiers ou deuxièmes étages, et ce tout au long de l’année, notamment grâce à sa portion de surface vitrée. L’impasse étant large, l’ensoleillement y est d’autant plus important. Elle est également tranquille, peu fréquentée. Deux ans après leur achat, les jeunes parents expliquent laisser en toute quiétude Carmen, 5 ans, y faire de la trottinette… « Piétonne, la rue sert aussi d’extension à notre foyer. Comme beaucoup de nos voisins qui vivent au rez-de-chaussée, nous y sortons une table l’été, mangeons dehors… » Un rapport à l’environnement extérieur rarement constaté dans une zone aussi urbanisée que la capitale.
Le couple avait choisi le 20e arrondissement pour les prix de son immobilier, plus abordables, et sa mixité sociale. Il prendra possession de l’espace comme d’un terrain de jeu : « Cette réfection a été mon premier projet d’architecte à mon compte, confirme Lisa. Avoir la double casquette de maître d’œuvre et de client a quelque chose de grisant, même s’il est parfois difficile de se fixer des limites tant on a envie d’explorer toutes les possibilités… » Très vite, pourtant, elle choisit de réduire les chambres à leur portion congrue (« On y dort, c’est tout ! ») pour, au contraire, privilégier un espace de vie volontairement très ouvert. Car Jonathan et Lisa ont comme grand principe celui de la convivialité. Eux qui adorent cuisiner et recevoir ne se voient pas le faire dans des pièces cloisonnées, étriquées, réduites à une seule fonctionnalité. La démarche, presque anthropologique, a quelque chose de tribal, chaque membre de la famille se partageant le même espace. Lisa poursuit : « Jonathan travaille de chez nous, moi en agence et Carmen est à la maternelle durant la journée, mais le reste du temps, dès qu’on est tous les trois, on a envie d’être ensemble… »
D’autres formes d’aménagement auraient facilité l’isolement. « Notre fille a quand même un lieu bien à elle où elle pourra grandir, précise encore sa mère, mais pour l’instant elle préfère dessiner ou faire de la pâte à modeler en notre compagnie. » Vivre compact, comme une forme encore inconsidérée de « vivre ensemble » : cliché détricoté ici à la faveur d’un nouveau tissage des liens familiaux.


