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Studio 5.5 x MUJI : la Manifesto house à Milan

Quand le design engage une autre façon d’habiter

À l’occasion de la Milan Design Week 2025, le studio français 5.5 et MUJI présentent le projet de la Manifesto House. Entre microarchitecture modulaire et objets réinventés à partir de produits existants, cette collaboration fait dialoguer design global, frugalité joyeuse et critique douce de nos habitudes de consommation. Une rencontre en marge du Salone, mais en plein dans son époque.

Une histoire collective du design

 

Derrière le nom Studio 5.5, quatre designers formés aux Arts Appliqués : Claire Renard, Jean-Sébastien Blanc, Vincent Baranger et Anthony Lebossé. Depuis 2003, le collectif s’est taillé une place à part dans le paysage français, entre engagement social et culture maker.
Dès leur premier projet, Réanim, la médecine des objets, les 5.5 posent les bases d’une pratique radicalement libre : penser le design comme un outil critique, narratif et ancré dans le quotidien. Les « chirurgiens du meuble », comme on les a surnommés, interviennent dans des domaines variés (luxe, grande distribution, édition, scénographie…), tout en gardant une même exigence : questionner l’utilité réelle des objets et leur rôle dans notre vie.

 

Portait Claire Renard & Jean-Sébastien Blanc © CP

MUJI MUJI 5.5 : vers une sobriété active

 

C’est donc tout naturellement que MUJI, chantre du fonctionnalisme japonais et de la beauté discrète, a choisi le studio pour imaginer un projet singulier à Milan. Le lieu : une cour intérieure au calme, loin de l’agitation des stands officiels. L’ambition : proposer un espace manifeste qui interpelle sur notre manière d’habiter, d’acheter et de fabriquer.
Au centre du projet, la Manifesto House : une micro-architecture modulable construite à partir de matériaux biosourcés et recyclés. Chaque module s’inspire d’un rituel de la maison japonaise : le Genkan pour enlever ses chaussures, le Ofuro pour le bain, ou encore le Niwa, espace de respiration végétale. Ce n’est pas une maison, c’est un manifeste à vivre.

L’upcycling comme moteur créatif

 

Mais le geste ne s’arrête pas là. En parallèle, 5.5 a imaginé une série d’objets « ready-made » baptisée MUJI MUJI Collection. Le principe ? Partir de produits existants dans l’univers MUJI (boîtes de rangement, cintres, paniers, etc.) pour créer autre chose : une lampe, une cabane à oiseaux, un tabouret d’appoint… Chaque objet est accompagné de son plan de montage, librement accessible.
Le projet assume sa part de bricolage, au sens noble du terme, et invite chacun à reprendre la main sur sa manière de consommer. Loin du design figé, MUJI MUJI 5.5 propose une esthétique accessible, réversible, et surtout vivante.

Comment la collaboration avec MUJI a-t-elle démarré, et quelle a été votre toute première discussion pour définir l’esprit de cette “Manifesto House” ?

 

CLAIRE RENARD : En réalité, il faut commencer par le commencement : chez Muji, ils sont venus nous voir sans intention précise… En fait, ils ne savaient pas quoi faire. La maison mère souhaitait porter un discours sur tout ce qui touche au durable, et ils ont donc demandé à la filiale française : « Avec qui pourrions‑nous collaborer pour mener un projet autour de ce thème ? » Ils sont arrivés avec un besoin de clarification et de stratégie, sans réelle vision de la façon dont cela allait se concrétiser, que ce soit à travers un objet, une architecture, etc. Nous avons beaucoup travaillé avec eux pendant six mois, voire un an, mais essentiellement sur les grands fondements de Muji.
Qu’est‑ce que la marque ? Pourquoi, dans sa philosophie même, est‑elle écoresponsable sur certains sujets ? Elle suscite des critiques sur d’autres, car ce sont des produits internationaux : certains sont fabriqués en Chine, ce sont des boîtes en plastique, donc cela prête à discussion. Comment articuler tout cela ? Quel point d’ancrage choisir ? Quel élément saillant de la marque mettre en avant ? Il y a aussi le logo et le fait que les produits proposés sont intemporels : lorsqu’on achète une boîte, on la conserve pendant 20, 30 ou 50 ans.

Et puis, un jour, je ne sais pas pourquoi, on a parlé de notre expérience personnelle de Montigny-sur-Loing. Après le COVID, on a trouvé ce petit coin de verdure. Et en fait, pendant un an, Jean Seb et moi, on a un peu mis de côté notre boulot et on a passé nos week-ends et nos vacances à rénover cette maison plutôt en économie circulaire, à chercher plein de trucs sur leboncoin, que ce soit l’isolation, que ce soit les meubles, le bois de la terrasse, il y a une volonté de faire soi-même.

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : Dans une dynamique de quête d’autosuffisance, ce n’est pas une maison bourgeoise : elle ne fait que 25 mètres carrés et n’est pas reliée à l’eau courante. C’est plutôt une véritable immersion en connexion avec la nature, et un moyen de s’extraire un peu de la vie parisienne. Lorsqu’on est designer, on se trouve sans cesse au cœur des problématiques de marque : nouveaux produits, marketing, comment faire consommer davantage, comment toujours créer de la nouveauté. Cette expérience, on l’a vécue pendant le confinement lié au COVID, selon l’endroit où chacun était. Mais c’est un moment fort qui nous a permis de prendre du recul et de se demander : « Au fond, quels sont nos besoins ? »

La Manifesto House est compacte. Est-ce que l’habitat compact vous inspire, y voyez vous une réponse aux défis du logement dans une planète très peuplée aux ressources limitées?

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : Oui, c’est une très bonne chose. Ce n’est pas pour rien qu’au Japon, ils ont des hôtels capsules. C’est vrai que nous, on n’a jamais aimé ; c’est toujours agréable d’être dans un espace vaste, mais ce côté petit qui est à la fois…

 

CLAIRE RENARD : Synthétique !

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : Synthétique… et je pense aussi que c’est aussi une façon de se reconnecter à l’essentiel.

 

CLAIRE RENARD : Moins d’espace, c’est moins d’objets. Donc forcément, on est obligé de faire le tri autour de soi, alors que quand on a une villa de 300 m²…

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : …On accumule sans se préoccuper. Si on n’en a pas besoin, ce n’est pas grave, on prend, on achète. Alors que quand tu vis dans un petit espace, il faut limiter et se contenter de ce qui est essentiel à son existence, à satisfaire ses besoins primaires, ceux de l’homme: à savoir se nourrir, se vêtir…

 

CLAIRE RENARD : Et ce qui est intéressant, d’un point de vue purement pragmatique, c’est que, quand on vit dans de petits espaces, on a aussi moins besoin de chauffer. S’ils sont bien isolés, la chaleur humaine suffit : c’est un principe de nos grands‑parents, qui dormaient dans les granges au‑dessus des vaches, etc. Je pense que l’habitat léger est une vraie réponse pour l’avenir : on ne sait pas trop comment les territoires vont s’aménager et évoluer. Et puis, je trouve qu’il se dégage de ces villas une forme d’aliénation : on est contraint d’y aller parce que c’est notre résidence secondaire, c’est vaste, c’est… En fait, on se prive de la liberté d’explorer le monde autrement, ailleurs, à cause de la nécessité d’y être pour en rentabiliser le coût. Alors qu’avec un petit habitat, on le voit à Montigny : s’il fait beau, on y va ; s’il ne fait pas beau, on n’y va pas ; on n’est pas obligé d’y aller tous ensemble. En fait, il y a une forme de liberté. On ne va pas passer deux jours à ouvrir tous les volets de la maison. Je pense que le petit habitat, c’est un nouveau luxe et qui se rapproche d’une forme de liberté.

MUJI est synonyme de minimalisme et de fonctionnalité. Est-ce que cela vous a freiné dans vos envies, ou au contraire stimulé pour une créativité plus radicale ?

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : En fait, on n’accorde pas seulement de l’importance à l’esthétique finale de nos objets, mais c’est vrai que, chez Muji, au final, il y a une esthétique qui tient à ce côté simple. Donc, ça n’a pas été complètement naturels : c’est vrai qu’on essayait toujours d’être le moins bavards possible. Mais, au final, on n’a rien créé d’autre que d’utiliser ce qui existait et d’employer uniquement des produits un peu Muji pour aménager, les détourner ou, quand il n’y avait pas la réponse qu’on voulait, les réinventer.
Et je pense que ce n’est pas du 100 % Muji, mais c’est ça qui fait que c’est une collaboration : au final, je pense qu’on reconnaît notre univers dans cette maison et qu’on reconnaît le style Muji. Après, on est quand même allé s’inspirer de la culture japonaise traditionnelle, qui a été souvent une source d’inspiration pour cette collaboration.
C’est‑à‑dire, si tu arrives avec ton pur univers et que tu déroules ton truc, ce n’est jamais très passionnant ; ce qui est intéressant, c’est que ça nourrit aussi la rencontre avec un autre univers.

 

CLAIRE RENARD : Je crois que c’est assez contrasté, c’est ça qui est chouette.

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : Oui, et nous, ce qu’on aime bien, c’est la démarche et ce qu’on défend, plus que la conséquence de ce qu’on fait. C’est ce qu’on veut dire à travers cette maison, c’est ce qu’on propose qui est important.

 

CLAIRE RENARD : Le message, le discours. Ça, c’est plus important que le résultat final.

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : En fait, c’est plus important que : « Ah, c’est joli chez toi » ou : « Je me sens bien chez toi ». Après, ça ne veut pas dire que ces ressentis n’existent plus, que les gens ne les éprouvent plus. C’est une autre forme de beauté. Nous, on parle de… c’est un truc : on parle de « beau sens ». Tout le monde évoque le bon sens ; c’est souvent faire des choix de bon sens, mais nous, on parle du moment où l’on développe une esthétique du beau sens : de ce bon sens découle une forme de beauté que tu n’apprécies pas parce que ça claque, ça brille, c’est clinquant, c’est trop maquillé, c’est design. Non : tu l’apprécies parce que c’est humble, c’est malin, c’est intelligent, c’est simple, c’est humain !

Parmi les modules (Genkan, Ofuro, Daidokoro…), lequel vous a posé le plus de challenge pour en faire un espace réellement vécu ?

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : On n’a peut-être pas eu les mêmes ressenti… Je pense que celui où on a mis le plus de temps, pour être sincère, sans faire de discours…

 

CLAIRE RENARD : La terrasse ?

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : La terrasse, oui, on a mis du temps parce qu’on voulait un espace à l’extérieur.

 

CLAIRE RENARD : On avait identifié la boîte de rangement. Ça pouvait servir de jardinière, mais…

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : Non, bien avant cela, on s’est posé la question : faut‑il vraiment une terrasse à l’extérieur ? Cette maison est déjà implantée dans un jardin, alors pourquoi ajouter un module terrasse ? Ensuite, on a pensé qu’il fallait aussi prendre soin de soi : on avait envisagé une salle de sport, pratiquer des exercices avec des anneaux ou un sac de frappe. Mais, de toute façon, « il » va courir ; pourquoi créer une salle de sport ? Est-ce qu’on en a vraiment besoin ? À un moment donné, on a finalement considéré qu’il y avait tout de même ce concept de jardin japonais, structurant dans l’art de vivre.

 

CLAIRE RENARD : Il y avait deux choses: le jardin japonais, puis l’idée aussi, finalement, de se nourrir, par rapport à l’autosuffisance, etc. Et c’est vrai que dans la nature, tout n’est pas forcément bon à manger. Donc ça permettait de faire la connexion, de se dire : « finalement, cette terrasse qui pourrait être vivrière, fait la connexion entre le dedans et le dehors, entre la nature et ce qu’elle m’offre. Et est-ce que moi, je vais pouvoir la cultiver, la dompter finalement pour me nourrir ? » Et donc on a eu cette idée de boîte.

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : Oui, c’est ça.

Pour votre série d’objets “ready-made”, comment sélectionnez-vous les produits MUJI à détourner, et quel détournement vous a-t-il le plus surpris en atelier ?

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : On ne travaille pas en atelier, figure-toi.

 

CLAIRE RENARD : Mais surtout pour les objets !

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : On travaille en magasin.

 

CLAIRE RENARD : On est allé dans le magasin des Halles, on a créé directement en magasin. Non, mais vraiment, je te promets. Les vendeurs nous ont pris pour des tarés. Ils rangeaient derrière nous parce qu’ils voyaient qu’on touchait plein de trucs.

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : En fait, on a tout à disposition : on transforme le magasin en atelier. Au début, on se présente et ils disent : “Ne vous inquiétez pas, ce sont des designers, ils réfléchissent”. Du coup, on a tout sur place et on combine : “Alors, on sait qu’on a besoin de ça, on a besoin de ci.”

 

CLAIRE RENARD : Par exemple, pour l’entrée, on a besoin d’un meuble à chaussures, parce que forcément on enlève nos chaussures. Muji propose plein de boîtes aux profondeurs, dimensions et hauteurs variées, qui s’emboîtent et restent parfaitement fonctionnelles. Il ne restait plus qu’à choisir les bonnes boîtes et à trouver le coussin adapté pour le dessus. Mais vraiment, ça s’est fait en boutique. Je vois la patère, la cabane à oiseaux. On avait identifié des objets sur le site, mais après, il y a peut‑être eu quatre propositions de cabane à oiseaux pour Milan. Et, au final, on en a retenu une qui me paraissait la synthèse même de ce module pour oiseaux, parce qu’elle reprenait vraiment cette idée de tranche, comme la maison, avec ce trou qu’on ouvre, et tout était calibré.

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : À la base, on part d’un besoin quand même, c’est-à-dire, on ne fait pas des objets pour faire des objets. On voulait faire une sonnette pour la maison parce que comme il n’y a pas de sas, il y a une proximité, c’est bizarre de voir des gens arriver chez toi comme ça. Tu vas chez Leroy Merlin, ils te vendent un bouton avec une pile, il faut acheter le boîtier, tu mets une domotique à l’intérieur. Pour moi, une sonnette dans mon imaginaire, c’est ding-dong, je suis là. Et donc c’est tout mignon, donc on prend un bol en acier, on prend une cuillère, on commence à se demander comment peut-on faire du bruit, comment créer la petite sonnette ? C’est un objet hyper marrant, mais qui est assez symbolique de notre approche. À Milan, tous les gens qui rentraient dans cette maison utilisaient la petite cuillère sur la cloche et ding-dong, je suis là. Et ça fait vraiment le petit ding-dong qui est charmant, qui est simple, et le petit bruit qui fait du bien.

Vous revendiquez un design de la décroissance pour ralentir nos modes de vie. Concrètement, comment ce principe a-t-il guidé vos choix de matériaux et de process dans ce projet ?

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : Comme je te le disais, on ne choisit pas des matériaux, on choisit des objets.

 

CLAIRE RENARD : Mais, pour la cabane en elle‑même, pour l’architecture, on a quand même choisi du bois FFC, donc bien traité. Pour toute l’isolation, on a réutilisé du textile. Je ne sais pas si tu vois : le relais où tu mets des bennes à vêtements. En fait, après, ils fabriquent des panneaux d’isolant en textile recyclé. Donc, on a utilisé ça. En plus, ça faisait écho à la partie textile de Muji.

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : Oui, ce sont des vêtements recyclés. Pour l’isolation de la maison, il existe différentes techniques.

 

CLAIRE RENARD : En fait, cette maison, c’est un peu une synthèse de plein de choses qui existent. Tu vois, le toit est blanc pour que ça ne réfléchisse pas la chaleur, et puis la récupération de l’eau dans ce gros réservoir. C’est juste de la ventilation naturelle : la maison est surélevée, sur pilotis, et il n’y a pas de grenier entre le plafond et le toit. Du coup, ça crée une circulation d’air naturelle. On a essayé de reprendre des principes qui existent.

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : Tu n’as pas pas besoin d’avoir une climatisation.

 

CLAIRE RENARD : En fait, il y a des choses de bon sens. Il s’agit donc d’essayer de répondre à la problématique en utilisant le moins de matière possible et en prélevant le moins possible sur la Terre. Après, ce qui existe est là : on n’a pas de problème à utiliser l’existant, on travaille avec ce qui est déjà disponible. On adore cette idée de « Donne‑moi quelque chose, je te fais autre chose ». Souvent, quand on a un client, plutôt que de recréer depuis zéro, on préfère réemployer ce qui existe… Dans une logique de décroissance, c’est aussi se demander comment, à un moment donné, on peut casser le rythme imposé par la société de consommation qui nous fait croire que plus on consomme, plus on est heureux et que c’est un accomplissement. C’est donc aussi se reconnecter avec la nature.

Quelle trace concrète espérez-vous laisser dans l’esprit de ceux qui ont vécu cette Manifesto House ?

 

CLAIRE RENARD : Est-ce que déjà, ils ont vécu complètement ? Parce que je pense que pour la vivre, il faut y vivre.

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : Il faut y dormir.

 

CLAIRE RENARD : Mais c’est une bonne question. En tout cas, Je pense qu’on touche à l’inconscient collectif et à des rêves de gamin qu’on a tous eus, de sa petite maison à soi. Voilà, faire sa cabane avec sa couverture et ses trois chaises. Et là, c’est comme un rêve de gosse qui prend forme, qui est réaliste, qui est réalisé et qui est « abordable » dans la tête des gens. On n’a pas de prix à donner, mais on se doute qu’une petite maison comme ça, elle reste accessible financièrement et du coup, il y a une vraie projection. Le nombre de gens qui nous demandent… Là, j’ai encore une Brésilienne qui me dit : « Est-ce que je peux l’acheter au Brésil ? » Les gens ont envie.

 

JEAN-SÉBASTIEN BLANC : Il s’agit d’un rêve qui ne se limite pas à la prospective : ça paraît abordable. Tout le monde se projette facilement en se disant : « Moi aussi, je veux vivre là‑dedans ». En fait, ce n’est pas fou ; autant le dire : devenir propriétaire à Paris, c’est se heurter tout de suite aux barrières et aux prix. Là, tu imagines qu’honnêtement, on a fait des études, des approches de prix et tout, mais pour moins de 100 000 €. Et sans doute beaucoup moins… (Je dis ça pour ne pas prendre de risque et éviter 10 000 appels, si jamais !) Mais il y a cette envie de faire quelque chose de démocratique, que tout le monde peut se payer comme un rêve accessible. Et je pense que c’est ce qu’on laisse. Après, je ne sais pas si tu as suivi, mais on a reçu une distinction : on a reçu le prix du projet le plus durable de Milan cette année, ce qui est un peu incroyable pour nous. À la fois, ça me paraît logique, face à toutes les réflexions qu’on a menées, et tout ce qu’on a vu chez plein de gens qui font du greenwashing dans tous les sens, et où ça pue le faux: « J’ai envie, j’ai envie », mais je ne fais rien pour changer le monde. Nous, on a envie de faire quelque chose de bien, de faire quelque chose de vrai, de faire quelque chose qui a du sens. Et je pense que c’est ce qu’on laisse.

 

Portait Claire Renard & Jean-Sébastien Blanc © Insta 5.5


Texte : Robin Bullot