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Pop à Popincourt, dans 65 m² à Paris

L'appartement arty de Mireille, Mathias et Geoffrey. C’est l’histoire d’une micro-migration. Celle de deux beaux oiseaux, Mathias et Geoffrey, qui s’envolent de leur perchoir rue du Château d’eau, pour se poser à quelques centaines de mètres, dans le quartier Popincourt. Au 5ème étage d’un immeuble des années 1850. Avec leur chat Mireille dans les bagages. Ils voulaient rester à 5-6 minutes de République. Et pourtant, tout est différent. C’est là qu’on perçoit la magie de Paris, et ses univers qui changent d’une rue à l’autre.

C’est Mathias qui le visite un samedi où Geoffrey travaille. Et le coup de cœur est immédiat. Pourtant c’est au-dessus de l’avenue Parmentier, limite qu’ils s’étaient fixés. Geoffrey s’arrange pour passer. Leurs cœurs battent à l’unisson. Il y a même un balcon filant, leur critère n°1. Ils l’achètent aussitôt. Et décident de tout refaire. Entre le parquet flottant qui cachait des trous de souris, les couleurs criardes des pièces, la salle de bains et la cuisine sans lumière naturelle, il y a du travail. Plus qu’ils ne l’imaginaient. Du coup, une grande partie du budget passe dans les aménagements structurels au détriment de la déco. Ils feront ça plus tard. Ils adorent ça.

Au début, ils se disent qu’ils veulent faire "un appart à grands diners". Avec une cuisine centrale au milieu de la plus grande surface possible. Mathias s’imagine cuisiner pour ses amis avec un sound system à fond. Et une chambre cabine en second jour, toute petite, au fond. C’est l’enthousiasme des commencements. Quand ils y repensent, ils jugent leur idée "complètement con". Et puis ils réfléchissent avec un ami architecte, de l'agence Bateaumagne. Leurs intuitions se rejoignent, ils s'accordent sur la même solution : une circulation par l’arrière. Pour séparer la chambre du séjour, créer une salle de bains sur cour et une chambre indépendante sur la rue. Dans le séjour, ils dégagent les poutres enserrées dans un bar et créent une grande pièce avec cuisine ouverte. C’est la bonne recette. Mathias et Geoffrey disent qu’ils ont acheté l’appartement pour lui-même plus que pour le quartier. Mais depuis 6 ans qu’ils l’occupent, tout a changé. Une vraie vie gastronomique s’est développée, les commerçants se parlent et il fait bon s’y promener. Il y avait déjà ça à Château d’eau, mais en presque trop touristique. Avec des "boutiques de blogueuses". Ici, ça reste plus authentique, plus populaire. Et aussi plus sale et plus bruyant. Mais Geoffrey y a trouvé ses habitudes. Et Mireille aussi. Seul Mathias trouve que le mix « bars étudiants » de la rue Oberkampf avec le cossu bourgeois de l’avenue Parmentier n’est pas toujours évident. Il y a peut-être une nouvelle migration dans l’air. Pas très loin, vous l’aurez compris.

Depuis le balcon de Geoffrey et Mathias, on a vue sur un pan de mur, lieu de prédilection pour les graffers de la capitale. Il change en permanence, comme le quartier Popincourt où ils ont posé leurs valises.

D’un graphisme l’autre, celui-ci plus traditionnel, qui nous ramène à l’histoire vénérable de cet immeuble du XIXème siècle.

Et nous voici dans l’entrée, avec au fond le carrelage graphique de la salle de bains. Au sol, on remarque l’élégant béton peint en noir qui recouvre tout le sol de l’appartement hormis celui du séjour et de la salle de bains où les matériaux d’origine ont pu être restaurés.

Nous voici dans le séjour, côté cuisine et salle à manger.

 

On recule encore un peu, pour passer de l’autre côté des poutres qui étaient prises dans le mur qui séparait la salle à manger du salon. On admire la sobriété de la cuisine ouverte qui a des airs de simple buffet bas. On a volontairement évité des meubles de rangement haut. On leur a substitué une étagère filante qui permet d’accentuer l’aspect séjour en accueillant de nombreux cadres.

Et voici Mireille, avec derrière elle, une belle galerie d’oeuvres sur la tablette. Avec de gauche à droite : Ivan Le Pays, Samuel Eckert, une petite sculpture en verre de Dawn Bendick (Observatory Studios) et une photo de Sunda Limbu.  Et tout à droite, un dessin de Abdelkader Benchamma.

 

La salle à manger dans son ensemble, avec derrière, la cuisine “hyper minimaliste sans rien qui dépasse“, comme le dit Geoffrey. Minimaliste mais pratique, pour éviter la dictature esthétique.

Focus sur cette mise en place qui nous évoque la Grèce pas si antique, en mode vacances 2021. Vivement qu’on puisse y retourner !

Avec déjà un avant-goût des beaux jours grâce au balcon filant et à sa charmante table de jardin ! “L’ex proprio n’avait pas la main verte. Elle avait dit « ne rêvez pas » tout est mort sur ce balcon. Pourtant, on réussit à y faire pousser plein de choses !“, nous glisse Geoffrey.

On aime la vue rétro-moderne typiquement parisienne. “Le balcon était le paramètre N°1 dans notre recherche“, raconte Mathias. “À partir du mois d’avril, on y mange dès qu’il fait un peu chaud. Là, tu le vois pas au top parce que c’est l’hiver. Mais c’est hyper agréable d’y glander. J’ai pris des coups de soleil en bouquinant. On ne reviendra jamais dans un appart sans balcon. Et avec un fumeur c’est pas mal. Et très bien pour Mireille le chat.” 

Rentrons dans le salon. Nous découvrons tout le séjour dans la longueur. Les poutres mises à nu créent une délimitation aussi légère que graphique de l’espace. On reconnaît le célèbre canapé LC3 du Corbusier accompagné par le lampadaire Mirobolite par Tsé Tsé de style Memphis. Sur le mur de gauche, une photo de Romain Laprade. L’ensemble dialogue avec une bergère de style Louis XVI et une commode ancienne. Pour un résultat aussi élégant que vivant.

 

 

“Regardez moi dans les yeux. J’ai dit les yeux !” nous demande Mireille accroupie sur un cube en miroir de chez AM.PM. Mais on ne peut s’empêcher de jeter un oeil à la table basse callipyge qui est en fait une oeuvre de Vincent Lorgé.

Et voici la pointe du salon où le fauteuil LC1 assorti au marbre noir de la cheminée répond à la masse du LC3 qui lui fait face. Qui dit balcon filant dit portes-fenêtre et deuxième “spot” extérieur !

Multiplier les tables et chaises de jardin le long du balcon, c’est idéal pour prendre un café en fonction de la lumière de la journée. Car comme le précise Mathias, “l’exposition de l’appartement est chouette : on a la lumière le matin dans le salon, le midi dans la chambre, et le soir dans la salle de bains.”

Demi-tour et vue sur la commode. Après les fesses, les seins. Saurez-vous les trouver ? Au dessus, une oeuvre de Nils Guadagnin.

Focus sur le plateau en marbre de la commode et son assortiment de livres précieux.

Le séjour depuis la salle à manger. On apprécie la géométrie élégante du placard sur mesure.

Jeu de lignes grâce au reflet du placard dans le plateau en verre de la table. Et pour nous signifier que le printemps est là, de jolies pivoines disposées dans le Vase d’Avril par Tsé Tsé dont le Musée Pompidou a estimé qu’il était un marqueur de son époque. Il l’a intégré dans sa collection permanente de design en 1997.

Si la cuisine est aussi discrète et se fond dans l’espace, c’est qu’un grand soin a été apporté à dissimuler tous les objets créant de la perturbation visuelle. Nous vous dévoilons donc une des astuces de l’architecte : le tiroir à électroménager. On y loge toutes les machines indispensables qui encombrent ordinairement le plan de travail. Toujours branchées, on les utilise aussi simplement qu’on les range. Idéal en ces temps de télé-travail pour alléger le décor derrière soi !

Passons à la chambre. Les deux pans de murs qui encadrent le lit ont été parés d’une couleur sombre pour un effet d’enveloppement très cocon. On remarque la bibliothèque de chevet intégrée à la cloison.

Le mur peint fait office de tête de lit. On remarque les célèbres appliques de Charlotte Perriand dessinées pour les appartements de la station des Arcs.

La vue vers le sas d’entrée qui dessert aussi le dressing, logé derrière le mur.

Pour respecter la direction artistique de la chambre, un accrochage en noir et blanc habille le mur.

Un dernier regard pour la chambre. On aperçoit sur la droite avant la porte l’entrée du dressing et plus loin la porte de la salle de bain où nous nous rendons immédiatement.

Nous découvrons une ambiance minimaliste inspirée par l’artiste Jean-Pierre Raynaud qui a réalisé une salle entièrement carrelée au Centre Pompidou à Paris ; elle fait partie de l’exposition permanente. Au dessus de la longue vasque en céramique, incrustée dans le miroir, une applique vintage trouvée dans une brocante “qui n’a pas conscience de ce qu’elle vend !” aux Sables d’Olonne.

La vue depuis la fenêtre sur une belle façade colorée.

Seule entorse à l’inspiration de la salle de Jean-Pierre Raynaud, le sol en vieilles tomettes. Ç’eut été un crève coeur de les retirer. Par conséquent, elles ont été repeintes en noir, pour assurer une continuité avec le béton peint de l’appartement.

Focus sur un flacon de parfum qui est parfaitement dans le thème de cette salle de bains.

On connaissait Mireille, et voici, par ordre d’apparition Geoffrey et Mathias, nos charmants hôtes !

Et parce que les meilleures Visites Guidées ont une fin, une dernière oeuvre pour la route.

Sans oublier toutes celles qu’on retrouve à l’extérieur !

Les adresses “Les yeux fermés” de Mathias et Geoffrey :
 
Un restaurant : le Myrobolant – 140 rue Saint Maur
 
Une épicerie Italienne : Paisano – 159 rue Saint Maur
 
Une super boutique de design (elle vient d’ouvrir) : Landline – 107 avenue Parmentier

Photographies : Agathe Tissier-Dumont http://agathetissier.com/
Texte : Jean Desportes

Réalisation : Bateau Magne - Mathias et Geoffrey