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Le duplex végétal d’Alexis Tricoire, 60 m² à Paris

Un peu d’Amazonie au cœur de la ville Fin des années 1980. Alexis Tricoire a 22 ans et est encore étudiant en design immobilier quand un ami l’appelle pour lui proposer un projet fou : acheter, avec cinq autres jeunes artistes, un lot de vieux ateliers d’artisans situés dans une ancienne impasse, à deux pas du faubourg Saint-Antoine. Le lieu est en ruine, abandonné depuis des décennies, il reste ici et là de vieux plâtres de moulures et quelques magazines datant de la guerre : c’est le coup de foudre.
Tout de suite, ça m’a fait rêver. Il y avait un petit jardin, c’était calme tout en restant central, c’était un environnement d’artistes, c’était inespéré”, raconte le designer. La bande se partage le lot, et pour 100 000 francs chacun (26 000 euros), les voilà propriétaires d’un bâtiment où tout est à refaire. Le jeune homme transforme l’ancien atelier en duplex, plante un lilas, et fait de l’appartement son port d’attache pendant plus de trente ans, avant d'à nouveau le rénover il y a quatre ans.

Je voulais qu’il y ait de la nature chez moi

Le long de ce petit jardin qui lui avait tapé dans l'œil, Alexis Tricoire décide d’installer un mur végétal. Il appelle Patrick Blanc, avec qui il a travaillé et dont il est devenu l’ami. “Il m’a dit : « Écoute, je vais t'aider à le faire », m’a fait une liste de plantes que j’ai commandées chez son pépiniériste et le jour de la plantation, il est venu et on a fait ça ensemble.”
À l’intérieur du loft, deux maîtres mots : optimisation de l’espace et équilibre des quatre éléments. Également architecte, il pense le lieu comme s’il était dans un bateau, réorganise la disposition des pièces pour économiser un couloir, élimine les obstacles visuels, travaille la fluidité. Le designer a un souhait : avoir le sentiment de vivre en harmonie avec la nature. Des touches de nature que l’on retrouve partout, de la photo de la jungle qui camoufle les parois des placards et du réfrigérateur, aux poignées en bois le long de l’escalier “qu’on escalade comme on grimperait à un arbre".

Une maison, c’est comme un temple, il y a quelque chose de sacré

Pour ce passionné d’Amazonie, cofondateur de l’association Jiboiana qui œuvre pour la protection de la forêt amazonienne et enseigne l’agroforesterie aux tribus autochtones, la maison est un temple, et le bois un matériau pas comme les autres. “Certes, l’arbre est mort, mais le bois, lui, évolue. Si tu l'huiles, si tu le laisses au soleil, si tu l’humidifies, à chaque fois il va réagir différemment. Au niveau moléculaire, ça reste une matière vivante.

Car de sa rencontre avec les Indiens Kayapos, Alexis Tricoire a aussi adopté la philosophie de vie.

 

L’architecte et designer Alexis Tricoire, vêtu de vert, sa couleur préférée, prend la pose dans un canapé Ottoman par Noé Duchaufour-Lawrance sous une réinterprétation personnelle d’un motif amazonien à la manière de Vasarely.

 

L’allée est une ancienne impasse, où se situaient jusqu’à il y a quelques dizaines d’années les ateliers des artisans ébénistes/menuisiers qui fournissaient les commerçants du faubourg Saint-Antoine. 

 

Devant les appartements se trouvent les anciens murs à pêches. Au XVIIIe siècle, ces murs étaient construits orientés au sud ou au sud-est pour les réchauffer le plus tôt possible dans la journée, et ainsi favoriser la culture de ce fruit.

 

Devant chaque loft, un petit jardin-terrasse. Le long du sien, Alexis Tricoire a installé avec l’aide de son ami le botaniste Patrick Blanc un mur végétal de 6 mètres carrés.

 

Pour paver la terrasse, le designer a utilisé les briques issues de la démolition du mur et a créé un jeu de motifs. Il a également dessiné une applique qui fait écho au paillasson.

 

À gauche de la porte, les patères, à la fois miroirs et porte manteaux, sont le modèle NAR6 dessiné par Alexis et édité par Ardi.

 

Dans l’entrée, Alexis a customisé une console Ikea en la fixant au muret en créant en dessous des rangements pour les chaussures.

 

La pièce, d’une trentaine de mètres carrés, bénéficie d’une double exposition grâce au puits de lumière créé par un Velux au-dessus de l’escalier.

 

Le rebord des fenêtres, comme le sol, est en béton ciré. Les fenêtres sont coulissantes afin de pouvoir poser des objets le long de celles-ci et de mieux réguler la quantité d’air.

 

Designer végétal, Alexis crée des objets et des projets mêlant nature et technologie, comme du mobilier urbain, des éclairages ou encore des assises.

 

Les suspensions Babylone, façon jardin suspendu, ont été dessinées par Alexis et sont éditées par le suédois Greenworks. En conservant la chaleur et l’humidité, elles recréent les conditions d’une serre, ce qui permet aux plantes tropicales de se développer.

 

La table basse, dont les trois panneaux pivotent, est une Roche Bobois dénichée sur Le bon coin. À droite, l’étagère en plexiglas est le modèle Maui dessiné par Alexis et fabriqué dans les années 2000 par les éditions Vange.

 

Au fond de la pièce, la rangée de placards et le réfrigérateur sont dissimulés par des parois en Dibond sur lesquelles a été imprimée une photo prise par Alexis dans la forêt amazonienne.

 

L’escalier, au centre de l’espace, est construit sur mesure autour du poteau qui soutient la dalle de béton du premier étage. Il est composé de plusieurs modules en acier corten, à la couleur rouille, et de planches en hêtre teinté de 40 mm.

 

Dans la cuisine, la couleur du plan de travail en acacia huilé, un bois européen qui résiste très bien à l’humidité, fait écho aux marches de l’escalier.

 

À l’étage, un camaïeu de verts. La couleur flashy et zébrée de la moquette de la chambre dynamise les teintes plus douces choisies pour les murs.

 

Au-dessus du lit, un vidéo-projecteur fait face aux stores pour transformer la chambre en home cinéma.

 

Sur le mur, un tableau panaméen représentant un aigle. « C’est un symbole de protection : l’aigle a une hauteur de vue, ça me permet de prendre du recul, de la perspective ! »

 

Pour le plan de travail de la salle d’eau, Alexis a utilisé du schiste provenant d’une carrière en Bretagne, à l’aspect charbonneux.

 

Une salle d’eau compacte mais au confort maximum grâce aux généreuses dimensions de la douche, qui mesure 120 x 90 cm. Sur le mur de l’escalier, une coiffe offerte par des chamans d’Amazonie.

 

Un esprit végétal jusque dans les toilettes. La poignée de porte « fantôme » est une création d’Alexis pour l’éditeur Ardi.

 

Les adresses “les yeux fermés” d’Alexis :
 
Pour du pain au goût et au parfum inimitables : Jaune – La petite boulangerie. Leur pain est fabriqué à base de farines paysannes, locales et biologiques, et enveloppé dans un torchon bien serré, il se garde plusieurs jours.
102 boulevard Diderot, 75012 Paris
 
Pour dénicher des variétés de légumes inconnues : La Main Verte. J’y achète tous mes légumes frais. Ils ont un choix incroyable : plein d’espèces d’oignons, de pommes, de choux… des légumes de saison, biologiques, provenant de circuits courts, pour un super rapport qualité prix.
73 boulevard Diderot, 75012 Paris
 
Pour des photos de nature : Galerie Umcebo – L’instantanée Galerie. Une galerie qui propose régulièrement de magnifiques photos de nature et dont on peut commander les œuvres en ligne. La galerie, elle, est ouverte de 16 heures à 19 heures, ou sur rendez-vous !
102 boulevard Diderot, 75012 Paris
 
Pour l’apéritif après le marché : Le Baron Rouge. Situé juste à côté du marché d’Aligre, le week-end c’est le lieu idéal pour déguster quelques huîtres accompagnées d’un verre de sancerre.
1 Rue Théophile Roussel, 75012 Paris
 

Photographies : Fabienne Delafraye
Texte : Guillemette Halard

Réalisation : Alexis Tricoire