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Le magazine des intérieurs urbains inspirants de 15 à 70 m²

58 m² tournés vers la lumière sur les hauteurs de Paris

Coup de frais sur un vieux soixante-huitard "Nous avons fait une offre dès notre première visite ! Nous connaissions l'immeuble, on habitait déjà dans le quartier. L'agencement intérieur nous a séduits, on s'est dit qu'il y avait quelque chose à faire. Et quand on a vu le panorama depuis le balcon…” L'ancien propriétaire de cet appartement avait acheté sur plan lors de la construction, en 1968, et il n'avait rien modifié depuis. Un terrain de jeu idéal pour Claire et Julien, tous deux architectes, malgré les fortes contraintes liées à la présence d'un mur porteur au centre de l'espace, de nombreuses gaines techniques et d'un plancher chauffant à ne pas toucher.

Afin d'optimiser l'espace, ils installent un bureau à l'emplacement de l'ancienne cuisine, et déplacent cette dernière dans… le cagibi ! “Nous avons déposé la cloison entre le cagibi existant et le salon et avons fait la jonction entre les deux espaces en venant "mordre" de quarante centimètres sur l'espace salon avec les meubles de cuisine.”

Membre du mouvement pour une frugalité heureuse et créative, Claire s'attache à ne pas faire de travaux inutiles : ainsi, lorsqu'ils arrachent la moquette vieillotte qui tapisse les pièces et tombent sur une dalle béton, ils la gardent brute, juste protégée par un vernis. Et dans les pièces d'eau, la mosaïque d'origine au sol est conservée. Tout comme les menuiseries : seules les poignées des portes - tout de même poncées et repeintes - sont changées.

De la même manière, ils ont envisagé un moment d’ouvrir les WC sur le couloir, mais ça les obligeait à percer le mur béton. “Afin d'éviter les nuisances mais aussi pour faciliter le travail des artisans, nous avons réduit autant que possible ce type d'intervention. Ainsi, lorsque toute l'électricité a été refaite, nous avons optimisé le circuit des câbles pour faire le moins de saignées possible, et avons même laissé les fils apparents au niveau des plafonniers, dans le bureau et la chambre. Nous avons également installé des cimaises pour accrocher nos tableaux, plutôt que de percer les murs.”

Un chantier raisonné, donc, mais qui ne cède rien sur le confort et la luminosité : c'est parti pour la visite !

Claire Arnaud et Julien Pasteau, ensemble à la ville mais pas à la scène. Claire est la co-fondatrice de l’agence arnaud & delrue, Julien est chargé de projet dans une grande agence parisienne.

Le hall d’entrée, chaleureux avec son travertin au sol, ses murs en ardoise, et le bois, omniprésent. Derrière l’accueil, une toile “à la manière de” Vasarely et, sur les murs, des sculptures en métal, accueillent le visiteur. Bienvenue dans les années 70s.

Nous voici arrivés. Déjà, le regard se porte vers la lumière, au fond. Mais patience, la vue, c’est pour plus tard ! À gauche, un meuble réalisé sur mesure. Bas près de la porte, il accueille les chaussures ; toute hauteur ensuite, il se mue en dressing.

Le bureau a remplacé l’ancienne cuisine. On y est accueilli par le gnome Attila de Starck (Kartell). Claire, assise à sa table en formica chinée sur Leboncoin, travaille (ou… admire le paysage !) sous un luminaire Akari de Noguchi.

La cuisine en longueur a pris la place du cagibi. La grande ouverture sur la salle à manger, à gauche, la sauve de toute sensation d’espace étriqué. Les meubles hauts ont été dimensionnés de manière à ne pas boucher la vue vers la baie vitrée. Coupe de fruits et moulins Alessi par Ettore Sottsass.

Focus sur les superbes effets de matière du marbre Vert des Alpes du plan de travail.

La vue depuis la cuisine. Le plan de travail fait office de passe-plats vers la table à rallonges en formica façon marbre. Autour, des chaises Eames DSR (Vitra), et sur la table, un remarquable chandelier modulaire des années 70 et un vase Alvar Aalto.

La nouvelle cuisine empiète sur les anciennes dimensions du salon. L’entrée de ce dernier a de fait été réduite. L’angle vide ainsi créé a été mis à profit pour installer des étagères où s’affiche une collection d’objets souvenirs (frisbee David Shrigley, horloge George Nelson…).

On ne va pas vous faire languir plus longtemps… Le panorama depuis le balcon. Eh oui, tout Paris à nos pieds ! Impressionnant, non ?

La bibliothèque occupe le plus grand pan de mur. “Nous ne l’avons pas prolongée jusqu’au placard de droite pour ne pas fermer l’espace, et nous avons installé un miroir entre les deux. Il capte le regard lorsqu’on entre dans la pièce et donne de la profondeur.” Sur le tapis berbère, chaise “Végétal” des frères Bouroullec (Vitra) et fauteuil RAR de Eames.

Livres de poche et livres d’art se côtoient dans ce meuble conçu sur mesure par les propriétaires. On a adapté la taille des étagères à nos livres et on a mis des portes en bas pour cacher les trucs moches !”

Point d’orgue de la rénovation, la cuisine se fait discrète côté salon, derrière des panneaux en chêne, tramés pour alléger l’ensemble. Seule la partie gauche s’ouvre de ce côté, cachant la vaisselle et le nécessaire de ménage. Appliques Teti d’Artemide.

Un quart de tour vers la droite et nous voici face au canapé convertible années 50 de Coen de Vries. Derrière, les vinyles de Julien dans leur meuble Tylko. Au mur, litho, dessins et photographies soulignent le goût pour l’art des maîtres de céans. Lampadaire IC F1 de Flos. Tabouret rose Colonna d’Ettore Sottsass (Kartell).

En sortant du salon, vue sur le placard bleu. Il habille toute la partie gauche du couloir, très (trop !) spacieux à l’origine, il permet aujourd’hui de regagner les espaces de rangement perdus lors de l’intégration de la cuisine dans l’ancien cagibi.

Au fond du couloir, l’entrée de la salle de bains. Le superbe bleu du placard en médium teinté dans la masse de Valchromat® dévoile ses effets de matière sous la lumière du jour. On retrouve ici le design des boutons de portes de la bibliothèque.

Et derrière la porte se cache… la mini-buanderie !

La salle de bains, toute de faïence blanche vêtue, est réchauffée par les portes en chêne du placard sous vasque et la mosaïque d’origine au sol. Le tout joliment éclairé par une applique Dioscuri (Artemide), modèle que l’on retrouve aux toilettes et dans le couloir.

Dans la chambre, le même médium de Valchromat® a été utilisé pour la réalisation des dressings mais, lieu de repos oblige, une teinte grise, plus douce, a été choisie. Lui fait écho le gris du linge de lit et de la lithographie au mur. Applique Nemo de Charlotte Perriand.

Là aussi, on profite du balcon orienté à l’ouest, idéal pour profiter de beaux couchers de soleil. La suspension “Cloud” de Frank Gehry (Belux) trône en majesté au-dessus du lit. Portant Hay.

Allez, pour le plaisir, un dernier petit coup d’œil sur la vue époustouflante avant de partir… Vous voyez la Tour Eiffel ?

Les adresses “les yeux fermés” de Claire et Julien :
 
Kelbongoo : Pour les produits frais à prix abordables, en circuit court, de petits producteurs picards, 18 rue du Borrégo, Paris 20e
Pane Vivo : Farine de blé dur au gluten 100 % digestible + mouture à la pierre + levain vieux de 133 ans = des pains uniques, bons au goût et pour la santé, 49 rue de la Chine, Paris 20e
Vino Sfuso : Dans cette épicerie italienne, on achète notre Prosecco en cuve. On y apporte nos bouteilles vides, ils les remplissent, les rebouchent… et tchin ! 5 rue Jean-Baptiste Dumay, Paris 20e

Photographies : Valerio Geraci
Texte : Edwige Nicot

Réalisation : arnaud & delrue